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Au lycée, il y a deux catégories de bons élèves. Les premiers sortent toujours d’un examen à peu près sûrs d’avoir fait le nécessaire. Sans s’épancher sur le sujet. Les seconds, pétris d’angoisses, imaginent sans cesse le pire – “J’ai tout raté” – et le martèlent à qui veut l’entendre, manière d’exorciser la peur de l’échec. Finalement, ils décrochent bien un 19/20… Passés dans le monde de l’entreprise, ces bons élèves-là ne courent plus après le bulletin parfait mais ils sont toujours en quête d’une forme de reconnaissance. De leur hiérarchie, de leurs collègues.

Le “syndrome du bon élève” n’a de syndrome que le nom mais il peut faire des dégâts. On le reconnaît à quatre caractéristiques principalement : les intéressés acceptent sans sourciller des tâches supplémentaires bien qu’ils soient déjà débordés. Ils sont réticents à déléguer ou à demander de l’aide. Ils s’excusent sans cesse, même pour les plus petites choses. Enfin, par peur d’être critiqués sur leur travail, ils sont dans une demande excessive de retours. Leur marque de fabrique : ne jamais décevoir, au mépris souvent de leur bien-être.

Surinvestis, malléables… Sur le papier, ce type de salarié a tout pour séduire l’employeur. Et dans la pratique ? Chercher la reconnaissance coûte que coûte peut nuire à votre carrière, estime Tessa West, professeure de psychologie sociale à l’Université de New York : “Lorsque leur hiérarchie leur demande un service, ces employés-là croient souvent à tort que cela leur permettra d’accéder eux-mêmes à ces positions de pouvoir.” En février, dans le podcast “Work it” du Financial Times, la psychologue mettait en garde contre cet excès de zèle : “Là où cela devient dangereux, c’est lorsque vous effectuez des missions pour lesquelles vous n’êtes pas payé et pour lesquelles vous n’obtenez aucun crédit. Vous devriez faire attention à cette dynamique entre vous et votre manager.”

Une vigilance qui s’opère dans les deux sens. Les responsables hiérarchiques ont en effet intérêt à se méfier de ces collaborateurs qui ne leur tiennent jamais tête. “J’ai vu trop de dirigeants se protéger des conflits opérationnels. Plus ils acquièrent de pouvoir, plus ils évincent les trublions […]. Ils se font politiciens, s’entourent de béni-oui-oui agréables et se laissent plus facilement séduire par les flagorneurs”, pointe le psychologue organisationnel Adam Grant (Think again, Alisio, 2023).

“Les recherches révèlent que lorsque leurs entreprises enregistrent de mauvais résultats, les PDG qui se complaisent dans la flatterie et le conformisme cèdent à l’excès de confiance, poursuit ce professeur de management à la Wharton School (Université de Pennsylvanie). Ils s’en tiennent à leurs plans stratégiques, au lieu de changer de direction – ce qui les conduit infailliblement à se heurter à l’échec.”

Les avantages des personnes qui ne cherchent pas à plaire

Mieux vaut encore, souligne-t-il, des individus “désagréables”, qui ont le mérite de donner des “feedbacks critiques que nous préférerions peut-être ne pas entendre, mais qui sont nécessaires”. A la condition toutefois que ces personnes “désagréables” sachent se fondre dans le collectif : des études conduites au sein d’entreprises pétrolières et technologiques indiquent, selon Adam Grant, que “l’insatisfaction ne favorise la créativité que lorsque les personnes se sentent impliquées et soutenues : les inadaptés sociaux sont plus susceptibles d’avoir une valeur ajoutée quand ils ont noué des liens forts avec leurs collègues”.

L’idée peut paraître contre-intuitive, mais mieux vaut parfois un rebelle – qui a comme boussole l’intérêt de l’entreprise – qu’un docile aux motivations plus personnelles. Ainsi, le psychothérapeute américain Bryan D. Johnson, chroniqueur pour le magazine Forbes, écrivait en mars : “D’après la recherche, les personnes qui ne cherchent pas à plaire et les non-conformistes ne sont pas nécessairement des fauteurs de troubles au travail.”

Ces “individualistes” sont, poursuivait-il, “plus enclins à travailler ensemble pour le plus grand bien de l’entreprise”. Et pour les personnes qui disent toujours oui ? “La conformité et l’approbation des autres sont plus importantes pour leur estime de soi, leur sécurité et leurs objectifs ambitieux que le bien commun”, concluait le spécialiste. Et à la fin, c’est l’entreprise qui est perdante.

Source: Laurent Berbon

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