ÉDITORIAL. Les affaires de «stalking» ont pris l’ascenseur ces dernières années, favorisées notamment par les réseaux sociaux. Les victimes vivent un enfer et les harceleurs sont rarement condamnés. Une nouvelle norme pénale acceptée par le National va changer la donne

«Il est 2h du matin. Le téléphone sonne. Lisa ne décroche pas. Elle sait qui appelle. Son ex-compagnon la harcèle depuis des mois, la suit partout, lui envoie des SMS jour et nuit. La traque est telle que Lisa s’isole. Elle demande à son stalker d’arrêter, en vain. Elle change de numéro de téléphone, quitte tous les réseaux sociaux, mais rien n’y fait. Le harcèlement s’intensifie. Et la police est impuissante: le stalking n’est pas punissable. Lisa est tombée en dépression et la traque continue.»

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Le témoignage relayé par la conseillère nationale Tamara Funiciello (PS/BE) a touché juste jeudi sous la Coupole. Le _stalking_ se répand dans le pays et les cas s’aggravent. Face à l’ampleur du phénomène, le vide juridique actuel ne se justifie plus et fait très mal. La nouvelle norme pénale sur ce harcèlement, acceptée au National, est une nécessité. Une urgence même, saluée par de nombreuses femmes et qui aurait peut-être sauvé une vie l’automne dernier.

Tout le Valais avait alors été choqué par l’histoire de Morane, 22 ans. La jeune femme a préféré le suicide à toute autre solution face au harcèlement obsessionnel et aux agressions qu’elle a subis durant plusieurs années. Elle a vécu un «enfer qui a conduit à l’impensable», évoque Philippe Nantermod (PLR/VS) avec émotion.

Une collaboratrice d’un centre de requérants d’asile a également vécu l’enfer à cause d’un réfugié iranien particulièrement insistant. Homme à l’origine de la prise d’otages près d’Yverdon en février dernier. Il a été tué par des agents de police alors qu’il se dirigeait vers eux, armé d’une hache. Moins dramatique, mais tout aussi problématique, le _stalking_ subi par la conseillère nationale Léonore Porchet (Les Vert·e·s/VD) il y a quelques années. Lors du dépôt de plainte, elle n’avait pas été prise au sérieux par la police… Finalement, l’auteur sera condamné pour «utilisation abusive d’une installation de communication».

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Pénaliser ce harcèlement est important en premier lieu pour les victimes: pouvoir déposer plainte est un succès en soi. Etre ensuite reconnue comme victime permet de faire cesser le harcèlement et aussi de se reconstruire.

Mais interdire le harcèlement compulsif est aussi important pour les auteurs. Incapables de contrôler leur obsession, ils n’arrêteront que s’ils sont contraints à le faire. Agir pénalement au stade du _stalking_ permettrait ainsi d’éviter des drames, des suicides, des homicides, des coups… Il s’agit de rompre la spirale de la violence le plus tôt possible. Cette nouvelle norme pénale fera aussi le plus grand bien aux _stalkers_: ils savent maintenant qu’ils seront traqués à leur tour.

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Source: Annick Chevillot

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