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Les résultats des élections des représentants au Parlement européen de ce dimanche 9 juin ont confirmé la tendance annoncée depuis des mois d’une forte participation pour des élections européennes et d’une domination absolue du Rassemblement national.

Nous comprenons ce ressentiment, ce goût amer des électeurs, qui ne sont pas écoutés et entendus depuis de trop nombreuses années. Car nous connaissons ces villes, ces territoires, leurs problèmes, leurs difficultés. Nous nous employons à les résoudre avec force, détermination, abnégation, mais sans être entendus par les gouvernants et les techniciens. Cette implacable défaite pour la majorité présidentielle a été transformée en crise politique majeure par le président de la République en déclarant la dissolution de l’Assemblée nationale. L’extrême droite n’a jamais été aussi proche du pouvoir en France et cela constituerait une première en temps de paix pour notre pays.

La décision du président de la République plonge la France, mais aussi l’Europe dans une incertitude non compatible avec les enjeux géopolitiques actuels. Elle déstabilise en outre le fonctionnement de l’Etat à quelques semaines des Jeux olympiques, face aux guerres actuelles menaçantes et elle force les communes à organiser des élections très compliquées dans l’urgence, alors que beaucoup de villes ont à cette période des festivals, des fêtes ou le passage de la flamme olympique.

L’erreur de diagnostic des élites et des dirigeants

Le Rassemblement national arrive en tête dans tous les départements français, excepté la Martinique et quatre départements d’Ile-de-France (la géographie, nous y reviendrons). Et dans plus de 32 300 communes sur environ 35 000, soit autour de 93 % ! Le RN a fortement progressé dans les villes sous-préfectures et moyennes (ainsi que la Corse et les Outre-mer). Il dépasse parfois plus de 50 % de bulletins exprimés (en présence de 37 autres listes).

La fracture territoriale est aujourd’hui totale. Elle est électorale et donc politique. Elle s’est encore fortement amplifiée entre les métropoles urbaines et le reste de la France. Ce vote révèle ce sentiment d’abandon (et donc cette réalité d’abandon, car un sentiment est une réalité en politique) des habitants des villes sous-préfectures (fermeture de maternités, des trains et TER qui ne fonctionnent pas, insécurité grandissante, peu de cadres et CSP + qui habitent dans les villes sous-préfectures, un revenu médian bas, etc.) qui se sentent non considérés, cela implique donc un rejet du président de la République et de la majorité actuelle.

Les gilets jaunes, mais aussi la réforme des retraites, ainsi que les prix des énergies, ont profondément ébranlé ces territoires avec une mobilisation sans précédent lors de ces événements. Mais comme toujours, aucune leçon n’a été apprise ou retenue, effacée par le “grand débat” (où les cahiers de doléances n’ont même pas encore été étudiés) et les 49.3. Les revendications sont pourtant toujours les mêmes : de la considération, un accès égalitaire aux services publics, et surtout une demande d’efficacité des services publics et de la dépense publique. Les Français demandent des résultats et de la performance opérationnelle. Ce qu’ils n’ont ou n’obtiennent pas.

Le plus frappant, c’est l’erreur de diagnostic des élites et des dirigeants (qui nous innervent en permanence de décisions technocratiques). Ils n’ont toujours pas compris. Ils n’ont quasiment rien compris, car ils ne vivent pas dans ces territoires et ces situations. Sans un bon diagnostic, il n’y a aucune chance que les politiques publiques menées par la suite soient bonnes et pertinentes. Les choix politiques de ces dernières années, pas assez tournés vers la France dans son entière diversité, notamment géographique, nous laissent encore une fois un sentiment d’abandon de nos territoires, malgré leurs nombreux atouts industriels, économiques, associatifs, écologiques et (géo) stratégiques pour la France de demain.

Nos gouvernants devraient relire Fernand Braudel (inspiré par Lucien Febvre), rappelant avec force : “La France se nomme diversité” dans son livre L’identité de la France. Avec ce passage éclairant : “Au soir de sa vie, le grand historien nous livre avec rigueur et passion les clefs de l’histoire de France : il en observe, fasciné, l’extrême diversité ; analyse les mouvements profonds et silencieux qui traversent l’espace”. Cet oubli de la géographie contemporaine (d’autant plus avec les phénomènes de mondialisation et de métropolisation) est une erreur majeure, capitale, profonde.

La France compte 235 sous-préfectures avec leurs bassins de vie. Ce sont des villes de flux, de centralités avec les coûts associés : voirie, réseaux divers, trottoirs, réseaux de transports scolaires, gymnases, CCAS, etc. Nos villes de centralités peuvent doubler en démographie, en journée (générant des charges). L’avenir de notre pays et de notre République est en jeu. Nous devons tout faire pour que ces villes fassent obstacle au vote extrême lors des prochaines élections législatives.

Sur le plan industriel, une centaine d’hectares constructibles dans chaque ville sous-préfecture (et leur intercommunalité) est nécessaire pour (re) développer ces piliers industriels de notre République. C’est indispensable. En outre, des contrats de plan Etat – villes sous-préfectures doivent être promus. Ils doivent être structurants (il faut en finir avec le saupoudrage). Par ailleurs, un comité stratégique regroupant les 235 maires de villes sous-préfectures et les 235 sous-préfets (avec des réunions trois ou quatre fois par an), instance de promotion de ces villes et bassins de vie, serait très porteur.

Une profonde sécession géographique

Nous alertons depuis maintenant plusieurs années sur la montée d’un vote extrême dans ces villes, d’un rejet de la politique et du politique. Nous alertons les médias, les élites, les décideurs, les responsables politiques nationaux (Élysée, Matignon, ministres, Sénat, parlementaires…). Nous avons organisé plus de 100 rendez-vous à cet effet (documents, arguments et tribunes à l’appui). Même s’il y a une écoute polie de la part de nos interlocuteurs, aucune action concrète n’est entreprise afin de reconquérir notre pays et de refaire Nation. Ils ne comprennent pas. Ils gouvernent un pays, qu’ils ne connaissent pas.

L’éloignement géographique des grands centres de décision (et des emplois métropolitains supérieurs) y est pour beaucoup. La France a subi une profonde sécession géographique, donc territoriale, et en conséquence politique. Nous y sommes. Notre République est à terre. Nous souhaitons, sans tarder l’émergence d’une force républicaine alternative à la suite des élections législatives, capable de reconquérir nos villes sous-préfectures et leurs bassins de vie (50 000 habitants, 80 000 habitants… par ville sous-préfecture). Un rebond républicain doit être initié en proposant un fort plan d’actions puissant, efficace, structurant à destination des 235 villes sous-préfectures (irriguant ainsi tout le territoire national, incluant la Corse et les Outre-mer), en collaboration directe avec les maires et leurs habitants. Afin de maintenir et de perpétuer dans notre Nation “les masses de granit” sur le sol de l’ensemble de notre République.

* Fabien VERDIER, Maire de Châteaudun (Eure-et-Loir, 28), Président de l’Association “Mouvement pour le développement des villes Sous-préfectures”,

Bernard GUIRAUD, Maire de Lesparre-Médoc (Gironde, 33), Secrétaire de l’Association “Mouvement pour le développement des villes Sous-préfectures”,

Antoine SCHWOERER, Ancien conseiller ministériel, Secrétaire adjoint de l’Association “Mouvement pour le développement des villes Sous-préfectures”,

Patrice BERARD, Adjoint au Maire de Neufchâteau (Vosges, 88), Trésorier adjoint de l’Association “Mouvement pour le développement des villes Sous-préfectures”

Nadine GRELET CERTENAIS, Maire de La Flèche (Sarthe, 72)

Guillaume SYLVESTRE, Chercheur et expert en social data intelligence, Trésorier de l’Association “Mouvement pour le développement des villes Sous-préfectures”

Marc ANGENAULT, Maire de Loches (Indre-et-Loire, 37)

Jérôme GUILLEM, Maire de Langon, Président de la Communauté de Communes du Sud Gironde

Chantal Marie MALUS, Maire de Château-Chinon (Nièvre, 58)

Jean-Luc DUPONT, Maire de Chinon (Indre-et-Loire, 37)

Joël HOCQUELET, Maire de Marmande (Lot-et-Garonne, 47)

Alde HARMAND, Maire de Toul (Meurthe-et-Moselle, 54)

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