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“Vous savez, même nous on a du mal à suivre.” La stratégie du Rassemblement national envers ses alliés européens, c’est en interne qu’on en parle le mieux. Cela fait des années que le parti d’extrême droite brandit avec plus ou moins de conviction son ambition de créer un “supergroupe” au Parlement européen qui réunirait ses homologues nationalistes.

Pour l’heure, à Bruxelles, les partis nationalistes se répartissent dans deux grands groupes. Le groupe Identité et Démocratie (ID), où siègent notamment le Rassemblement national et son allié italien la Lega de Matteo Salvini, qui compte aujourd’hui 49 députés de huit nationalités différentes. Et le groupe des Conservateurs et Réformistes européens (ECR), qui compte 68 sièges, notamment les représentants de Fratelli d’Italia, le parti postfasciste au pouvoir de Giorgia Meloni. Selon les dernières projections d’Europe Elects pour les élections européennes, un groupe composé d’ID et d’ECR pourrait atteindre plus de 150 sièges et devenir la deuxième force à Bruxelles après le PPE, parti de centre droit d’Ursula Von der Leyen.

De quoi pousser Marine Le Pen à tendre la main aux élus par-delà le groupe ID. “Je pense que de plus en plus de mouvements politiques souverainistes se disent que, compte tenu de la vague qui nous porte, il faut qu’on puisse parler ensemble et peut-être à terme tenter de construire un grand groupe qui pourrait être le deuxième du parlement européen et changer les équilibres”, déclarait-elle encore, ce jeudi 30 mai, sur Franceinfo.

“L’idée a été abandonnée, assurait pourtant un cadre, fin avril. On s’est rendu compte que ce ne serait pas possible, on se tourne plutôt vers une plateforme de collaboration, ou une collaboration vote par vote avec les partis souverainistes.” Le RN, qui avait déjà fait campagne pour un supergroupe en 2019, a toujours échoué à réaliser cette alliance de grande ampleur, et en faisait moins la promotion, ces derniers temps. Il se prend de nouveau à rêver d’union. La faute à une séparation. Le 21 mai, après un nouveau dérapage de la tête de liste de l’AFD, Marine Le Pen a acté la fin de sa collaboration avec le parti d’extrême droite allemand allié du RN, et membre du même groupe Identité et Démocratie au Parlement européen.

Un changement de pied du RN vis-à-vis de Giorgia Meloni

A ce jour, le groupe ID, amputé d’une partie de ses membres, reste isolé sur la scène européenne, et mis de côté par les autres groupes européens qui l’entourent d’un cordon sanitaire et refusent de frayer avec des partis qu’ils considèrent comme sulfureux. Obligation de désenclavement oblige, Marine Le Pen a donc fait l’effort de tendre la main à Giorgia Meloni, présidente du Conseil italien. “Le moment est venu de s’unir […]. Si nous réussissons, nous pouvons devenir le deuxième groupe au Parlement européen”, a-t-elle déclaré, fin mai, au Corriere della Sera. Un petit pas pour le supergroupe, mais un grand pas pour Marine Le Pen, qui n’a jamais caché ses désaccords avec la leader Italienne, et lui préfère le président de la Lega, Matteo Salvini.

Le positionnement pro-Ukraine, atlantiste et conservateur de Giorgia Meloni n’a pas toujours été du goût de la députée du Pas-de-Calais qui, jusqu’à récemment, moquait la gestion de l’immigration de la cheffe de file italienne. “Il est vain d’en appeler à l’Union européenne pour résoudre la crise diplomatique comme un enfant appelle maman quand il a un problème. C’est vain et même dangereux”, raillait en privé Marine Le Pen, en septembre, en marge de sa rentrée politique. Et Jordan Bardella d’ajouter : “Si j’étais italien je serais déçu, mais je ne le suis pas. Notre allié, c’est Matteo Salvini.”

Mais la perspective de peser au Parlement européen vaut bien quelques reniements. “L’essentiel nous rassemble avec Meloni sur les grands sujets comme le Green deal, la fin des moteurs thermiques, le pacte des migrations, ou les sujets agricoles”, assure aujourd’hui le député RN Thibaut François, chargé en partie des relations avec les alliés européens.

Le président hongrois, Viktor Orban, allié de Marine Le Pen, a même mis la main à la pâte, appelant à l’union des souverainistes dans une interview accordée au Point, ce mercredi. “L’avenir de la droite en Europe repose entre les mains de deux femmes : Giorgia Meloni et Marine Le Pen”, a-t-il estimé. La présidente du conseil, elle, se réserve le droit de faire patienter ses courtisans. Car la possibilité d’une alliance avec le PPE s’offre aussi à la leader d’extrême droite, à qui Ursula Von Der Layen a déjà tendu la main à plusieurs reprises, estimant que son parti représentait un partenaire crédible à Bruxelles. C’est donc sur elle que repose, pour l’heure, l’équilibre prochain du Parlement européen.

“Ça reste complètement chimérique”

Peu désireuse de se faire distancier, Marine Le Pen a récemment donné de sa personne. Le 19 mai, elle s’est rendue à Madrid, aux côtés d’autres dirigeants nationalistes, dont les représentants de Vox, qui pourraient devenir des alliés du RN. Pour l’heure, c’est l’incertitude qui prime chez les frontistes. La question des alliances n’est pas abordée dans les bureaux de campagne, et tous jurent qu’elle sera traitée le 10 juin, au lendemain du scrutin, en fonction des nouveaux équilibres politiques.

Quant à l’avènement d’un supergroupe, les frontistes eux-mêmes restent sceptiques, quitte à contredire la patronne. “On avait eu cet objectif, c’est vrai, commente un cadre. Mais ça reste complètement chimérique, on n’a jamais réussi, il faut qu’on ait des ambitions plus simples : une coopération sur des textes plutôt qu’une grande alliance irréalisable.” Et un autre d’ajouter, plus lucide : “De toute façon, si les gens votaient pour nous en fonction de nos alliés ça se saurait, tout le monde s’en fout, sauf les journalistes.”

Source: Marylou Magal

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